Interview avec Eric Douennelle, président de PGA France


Publié le 1 octobre 2018

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Après ses études, Éric Douennelle passe son diplôme d’enseignant et travaille dans plusieurs golfs, notamment le Golf National, Maintenon et Dinard. Il crée ensuite sa propre école, le golf du Jardin à Paris. Il collabore à la même époque à Golf Magazine avant de devenir consultant pour Journal du Golf. Il écrit aussi un premier livre de technique, puis un deuxième avec Jean Van de Velde. Ensemble, ils débutent une collaboration afin que notre champion français accède au PGA Tour Champions. Invité sur plusieurs épreuves, Jean sillonne les USA avec Éric jusqu’à la redoutable épreuve des cartes, où il parvient, avec 82 % de greens pris en régulation, à obtenir une catégorie, mais son problème de genou le tient, depuis, à nouveau éloigné des fairways. Le magazine Practice vous propose un entretien avec celui qui préside aux destinées des pros français, par ailleurs directeur de la publication du magazine.

Vous commencez donc un nouveau mandat à la présidence de PGA France, l’association des pros français…
Éric Douennelle : « C’est le quatrième. Je suis arrivé en janvier 2007 pour terminer le mandat de mon prédécesseur. Et me voilà parti jusqu’en 2020, puisque personne ne s’est présenté en face de la liste que j’ai proposée. Cette situation de réélection à liste unique traduit probablement la satisfaction de nos collègues pour lesquels nous travaillons depuis dix ans. D’autre part, pour présider une telle entité il faut du temps et probablement quelques compétences. Je ne dis pas que de nombreux collègues ne pourraient pas assumer cette charge, au contraire, mais en ce qui me concerne je perçois mieux aujourd’hui le chemin qu’il a fallu parcourir. Il n’est pas impossible que nous formions la relève, ce serait sûrement le meilleur moyen de passer le témoin d’une association aux mille visages.

Qui compose la PGA France ?
É. D. : Cette grande famille de professionnels compte plus de 1 500 membres et rassemble à la fois des enseignants et des joueurs de circuit. Ces derniers ont été formés par des enseignants, et une partie d’entre eux seront les éducateurs de demain. Il était donc naturel que nous soyons tous réunis au sein de la PGA. Mon premier combat fut d’ailleurs de garder cette profession unie comme elle l’a toujours été depuis 1925, date de la création de l’APGF (l’association des professionnels de golf français), aïeule de la PGA. Il faut préciser que nous avons des catégories distinctes selon que l’on est en activité ou non, que l’on est élève-moniteur ou directeur-pro, etc. Et enfin que les joueurs ayant gagné sur le Tour européen deviennent de facto membres de la PGA. Si vous n’êtes pas membre, vous ne pouvez pas figurer au classement national. Cela fait partie des accords que nous avons avec la Fédération française de golf (FFGolf) et qui témoignent de la bonne entente entre nos deux entités.

Quel est le travail de la PGA ?
É. D. : On travaille dans plusieurs directions pour les joueurs comme pour les enseignants. L’une d’entre elles, qui nous paraissait primordiale, a été de structurer la post-formation des enseignants. Pas seulement pour que mes collègues développent des compétences, mais aussi pour qu’ils se retrouvent, qu’ils échangent et qu’un esprit de confraternité s’installe ou perdure. Et puis, incroyablement, nous étions un des rares pays à ne pas l’organiser. Avec 25 dates en 2016, nous avons parfois réuni jusqu’à 90 participants par session. Les pros ont pu rencontrer des intervenants français et étrangers qu’ils n’auraient jamais pu voir sans notre initiative et leur investissement. Grâce à cela, tous leurs élèves ont pu bénéficier des dernières nouveautés pédagogiques. Je tiens donc à faire passer le message suivant : “Si vous souhaitez prendre un cours, tournez-vous vers un professionnel PGA France, car il se forme tout au long de sa carrière.’’
 
Travaillez-vous aussi en direction des amateurs ?
É. D. : Oui, et c’est un axe qui nous occupe beaucoup. En étant en soutien des professionnels en activité, nous nous retrouvons indirectement au soutien de leurs élèves. Mais nous avons voulu aller un peu plus loin en créant le Club PGA il y a six ans. À l’origine, nous proposions un calendrier de compétitions, mais cela devenait assez contraignant. Nous nous sommes donc recentrés sur la promotion de nos pros avec le magazine Practice, et la production d’épreuves en alliance (un pro et un amateur). Dernièrement nous avons investi pour moderniser notre site web. Notre ambition est de proposer aux 407 000 licenciés un site qui référence les professionnels et l’ensemble des produits qu’ils souhaitent promouvoir. Cela sous-entendait de créer 1 500 pages “blog”, reliées à notre site ; cette phase est désormais terminée. Nous rentrons maintenant dans un cycle où chaque enseignant doit renseigner son compte. Cette future banque de données devrait venir se greffer d’ici un an à la carte de France des golfs de la FFGolf, afin d’améliorer l’audience d’un moteur de recherche “enseignement” qui sera utile à tous.

Êtes-vous satisfait, en termes de délai ?
É. D. : C’est toujours trop lent (rires). Ce site web a besoin des enseignants pour fonctionner. Après un an et demi de travail, j’aimerais qu’ils créent rapidement leur profil et qu’ils parlent de leurs produits. Mais à leur décharge, il faut comprendre qu’ils sont happés par leur quotidien. Pour avoir fait ce métier pendant dix-huit ans, je sais à quel point il peut être prenant et fatigant physiquement. On leur demande beaucoup sans en appréhender véritablement les contraintes.
 
Vous discutez également avec l’encadrement des golfs, les présidents et directeurs ?
É. D. : Une de nos activités consiste à conseiller nos pros, indépendants ou non, lors d’une prise de poste ou d’un départ par exemple. Mais depuis quelques années, nous travaillons en amont avec les présidents ou les directeurs pour construire avec eux  les conditions d’une collaboration réussie avec leur(s) enseignant(s). Généralement, nous parvenons à proposer des solutions équilibrées. Nous étudions les contrats de travail pour les salariés. Mais nous avons également travaillé avec la FFGolf pour bâtir une convention d’exercice pour  les indépendants, qui constitue une bonne base de départ. D’ailleurs, en discutant avec certains dirigeants, Yves Béchu – directeur  de la PGA France – et moi-même avons parfois été surpris de leur méconnaissance du métier d’enseignant. Ils restent parfois sur des a priori ou des légendes qui ne reflètent absolument plus la réalité. Je n’en ai jamais parlé auparavant, mais aujourd’hui j’attends plus d’écoute et de tolérance de la part de certains dirigeants afin qu’ils perçoivent le métier tel qu’il est et que les éléments de motivation soient présents. J’ai dirigé ma propre structure pendant presque treize ans, jusqu’au jour où le groupe LVMH m’a fait une proposition afin qu’il soit libre d’implanter la fondation Louis Vuitton à la place de mon practice au Jardin d’acclimatation. Ce site, dans Paris intra-muros mais en plein air, comptait 600 membres et cinq pros exerçaient à plein-temps. Le statut qu’ils avaient au sein de cette école, la rémunération et la reconnaissance des élèves comme de leur hiérarchie décuplaient leur envie de bien faire. Je sais que certains de mes collègues n’ont pas toujours toutes les compétences, notamment sur le plan commercial, mais nous travaillons sur ce point pour les accompagner. Si le pro est fondamental dans la stratégie de développement des golfs, il faut réfléchir aux conditions à réunir pour qu’il continue à s’impliquer. Sinon l’envie pourrait les prendre de se reconvertir, et les clubs perdraient alors les enseignants les plus expérimentés. Cette érosion a déjà commencé. Si notre travail consiste à améliorer les compétences de nos pros, il consiste aussi à donner notre point de vue sur les évolutions à imaginer. Nous devons permettre à l’un des hommes clefs du club de retrouver sa place, et urgemment, dans l’intérêt de notre sport. Nos élèves deviendront alors les ambas-sadeurs de l’enseignant, du club et du golf.
 
La PGA France est également promotrice de tournois...
É. D. : La PGA est d’une part promotrice de 100 épreuves régionales en ligues afin d’entretenir la flamme compétitive de nos pros. Mais elle organise aussi quatre tournois plus importants : L’open PGA France de Mont-de-Marsan, début avril, pour les joueurs professionnels, puis trois alliances (une formule – à la différence des pro-am – où un amateur joue avec un professionnel) : celle de la Costa Brava, puis le Championnat de France des enseignants en septembre suivi du Grand Prix des enseignants à Marrakech en décembre. Et à côté de cela, nous avons l’ambition de reconduire un Grand Prix PGA France pour 2019 et de le réaliser sur le parcours du golf PGA France du Vaudreuil. Au-delà de toutes ces épreuves, le dessein n’est évidemment pas que commercial, nous voulons surtout que les joueurs soient satisfaits de ce que la PGA fait pour eux et pour leur avenir.
 
Travaillez-vous en étroite relation avec la Fédération ?
É. D. : Bien sûr, et nous sommes présents dans de nombreuses commissions (développement, professionnelle, licence, etc.). Nous incitons aussi fortement nos membres à participer aux opérations découverte mises en place par la Fédération comme “Tous au golf”. Nous ne pouvons pas lui reprocher, comme je l’ai fait par le passé, de ne pas promouvoir l’enseignement et dans le même temps ne pas participer à ces opérations pourvoyeuses de nouveaux élèves. Nous proposons aussi comme avantage avec la licence de bénéficier du dispositif “Une leçon achetée, une leçon offerte’’ pour lequel 300 pros se sont portés volontaires. Enfin et pour clore ce chapitre, nous avons construit avec les services de la Fédération le “Pass go for golf”, qui propose quatre heures de cours (où tout est compris) et qui va donc au-delà de la seule séance de découverte.
 
Quels sont vos rapports avec la Fédération française de golf ?
É. D. : Que ce soit avec Jean-Lou Charon, le président de la Fédération, Christophe Muniesa le directeur général, ou la FFGolf dans son ensemble, les rapports sont excellents. Il y a également une vraie collaboration avec les services dirigés par Pierre Lasfargue ; je pense notamment à la refonte des drapeaux et de la carte verte qui sont des outils formidables de motivation pour nos élèves. Le système des drapeaux est comparable à celui des étoiles au ski : l’enfant doit pouvoir quantifier son niveau et les progrès qu’il a à accomplir. L’insigne est le Graal convoité. Le passage des drapeaux devrait quasiment être obligatoire dans toutes les écoles de golf de France, à l’instar des étoiles dans les écoles de ski. Les compétitions et l’index ne sont pas assez attrayants pour cette tranche d’âge, presque hors de portée.

Cherchez-vous à aller encore plus loin dans votre partenariat ?
É. D. : On cherche à transmettre la passion du golf à nos élèves. La Fédération a quant à elle à cœur d’accroître le nombre de licenciés à travers ses multiples actions (Ryder Cup, Open de France, plan 100 petites structures, soutien du haut niveau, communication, soutien logistique des clubs, formation, golf amateur, etc.). Nos intérêts sont clairement convergents. J’ai dernièrement abordé avec le président Charon l’éventualité que les enseignants aient un rôle dans la prescription de la licence. J’espère que cela deviendra réalité un jour. Je reste persuadé qu’un pro, après avoir séduit quelques initiés durant sa leçon, est la personne la mieux placée pour être prescripteur de la licence.
 
Vous accompagnez également la gestion du golf PGA France du Vaudreuil.
É. D. : C’est une super expérience que nous menons, à travers la présence de Frédéric Schmitt (vice-président de PGA France et fondateur de Journal du Golf), et sous la surveillance bienveillante de Jean-Claude Forestier, son propriétaire. Il avait envie de se démarquer de la concurrence, d’élever son golf à un standard de qualité élevé, il a donc investi dans l’ensemble des infrastructures (club-house, restaurant, hôtel, practice, Golf Court Academy, et le parcours évidemment). Mais également sur le plan humain avec l’arrivée dernièrement de Guillaume Biaugeaud, l’ex-pro du Racing Club de France, et d’une équipe de choc avec toutes les personnes de l’accueil. C’était bien la moindre des choses que de l’accompagner dans la gestion de son parcours. Cela pourrait donner des idées à d’autres structures que PGA France les accompagne. L’avenir nous le dira. »
 

Propos recueillis par Arnaud Tillous (Extrait du magazine Practice n°23)– Photos Philippe Millereau