LE MENTAL AU GOLF : La stratégie de l’échec


Publié le 5 novembre 2018

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Imaginez le pire ! Voici un conseil que je pourrais vous donner. Vous pourriez me prendre pour un fou, mais ce serait peut-être un des meilleurs conseils à appliquer sur le parcours.

La plupart des personnes vous diront qu'il faut imaginer le meilleur ou, du moins, ce que vous voulez, mais c'est mal connaître le fonctionnement de notre cerveau. Et je vais vous expliquer comment la « stratégie de l'échec » peut vous permettre d'éviter beaucoup d'erreurs.
Je suis persuadé que vous avez déjà vécu cette situation où, après une balle hors limite ou dans l'eau, vous mettez en jeu une deuxième balle parfaite, exactement comme vous le souhaitiez la première fois. Sans le savoir, vous avez inconsciemment appliqué la stratégie de l'échec. Voici pourquoi.

À chaque coup, notre cerveau va imaginer tous les scénarios possibles. Par exemple, si vous êtes sur un tee de départ avec de l'eau à votre droite, votre cerveau va imaginer le scénario où la balle tombe dans l'eau. Il va ensuite comparer cette situation avec votre niveau de confiance (votre « capacité à »), et si celui-ci est bas, il va alors retenir ce scénario comme une possibilité. Il va vous alerter avec la peur et vos yeux vont se tourner vers l'eau avec une pensée du genre « j'espère que je ne vais pas la mettre dans l'eau ». Mais c'est trop tard, il a déjà retenu ce scénario comme une éventualité élevée. Si vous aviez eu un niveau de confiance élevé, il n'aurait pas retenu l'obstacle comme dangereux. Le problème, c'est qu'au moment où on prend conscience de la possibilité de mettre la balle dans l'eau, c'est déjà trop tard. Nous adoptons alors un comportement complètement inefficace pour éviter l'erreur : se focaliser sur ce qu'on veut faire. Mais cela sans prendre en compte la peur qui vient de nous arriver. Vous allez rentrer dans un combat entre votre inconscient (qui vous alerte) et votre conscient (qui veut vous sauver), dont nous connaissons déjà le gagnant. Votre inconscient sera en effet toujours plus fort que votre conscient, et votre volonté ne suffira pas toujours à gagner ce combat.

C'est le moment d'adopter la stratégie de l'échec ! Nous allons utiliser le fonctionnement du cerveau à notre faveur. Il vient de nous avertir du danger, donc au lieu de jouer avec la peur et de prier pour que tout se passe bien, nous allons directement nous confronter à la situation. Pas en réel, car vous n'allez pas envoyer votre balle dans l'eau, mais avec votre imaginaire. Vous devez déjà savoir que le cerveau ne fait pas la différence entre le réel et l'imaginaire. Le meilleur exemple est le rêve, qui provoque des réactions identiques à la réalité, comme si nous étions vraiment en train de vivre la scène.

Donc si vous ressentez une appréhension avant de jouer un coup, voici la stratégie de l'échec à adopter : 
     - Demandez-vous de quoi vous avez peur ;
     - Imaginez ensuite le scénario ;
     - Prenez votre club et faite un coup d'essai comme si vous jouiez le coup ;
     - Comme si vous veniez de rater le coup, demandez-vous maintenant : « Qu'est-ce que je veux à la place ? »
     - Jouez le coup que vous voulez faire.

En appliquant la stratégie de l'échec, vous allez agir sur différents leviers psychologiques et émotionnels : 
     - Vous allez réduire la peur : souvent, nous imaginons les choses pires qu'elles ne sont. Une balle dans l'eau n'est pas la fin du monde !
     - Vous allez pouvoir vous concentrer sur ce que vous voulez, une fois que vous aurez évacué ce que vous ne vous vouliez pas.
     - Vous allez créer moins de références négatives impactantes : l'imaginaire a tout de même moins d'impact que le réel sur notre mémoire !

Bien sûr, cette stratégie n'est à appliquer que si vous ressentez une appréhension avant de jouer. Cela peut être lié à un obstacle ou à un enjeu. De plus, je vous conseille vivement d'élever votre niveau de jeu afin d'élever votre niveau de confiance, et diminuer ainsi le nombre de situations à risque.

Plus vous augmentez votre niveau de jeu, plus vous allez faire disparaitre de votre cerveau certaines situations qui ne sont plus de votre niveau. Par exemple, si vous tapez correctement le drive à plus de 180 m et que vous avez un obstacle d'eau devant vous sur une longueur de 150 m, vous n'aurez peut-être pas la même appréhension qu'un joueur qui n'est pas à l'aise avec son drive et qui peut parfois faire moins de 150 m.

Testez cette stratégie, et vous verrez que vous ferez disparaître de votre dialogue interne une phrase qu'on entend beaucoup sur les parcours de golf dans cette situation : « Je le savais ! » En disant ça, vous dites, en fait, que vous saviez que ce scénario était possible, mais vous n'avez pas pris le temps de l'éliminer en croyant être plus fort que votre inconscient.

Vous ne serez jamais plus fort que votre inconscient, mais vous pourrez « l'avoir » en utilisant à bon escient la stratégie de l'échec.


Par Ludovic Leroux
Expert en neurosciences et Préparateur mental de joueurs profession-nels et amateurs (European Tour, Challenge Tour, Alps Tour…).