Portrait des pros - Bucciarelli, le golf tout terrain


Publié le 8 juillet 2020

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À 43 ans, Vincent Bucciarelli enseigne le golf depuis une quinzaine d’années. Avec son parcours atypique, cet ancien Vététiste professionnel est désormais Pro au golf d’Ozoir-la-Ferrière, et souhaite enseigner au plus haut niveau.

Vincent Bucciarelli a 24 ans quand il touche un club de golf pour la première fois. Nous sommes en 2002 et le jeune professeur d’EPS enseigne alors le sport dans un collège de Montreuil. Dans le cadre du projet éducatif de Bill Owens, visant à démocratiser le golf dans des quartiers où ce sport demeure inaccessible, le jeune diplômé du Capeps doit l’enseigner à ses élèves. Après quelques cours collectifs organisés par l’inventeur de la méthode Triangulaid, l’enseignant tombe rapidement amoureux de la petite balle blanche et s’y plonge à corps perdu.

« Je me suis très vite pris de passion pour ce sport, raconte-t-il. Comme prof d’EPS, je donnais 20 heures de cours par semaine. Cela me laissait beaucoup de temps pour jouer au golf et je n’ai alors plus fait que ça. J’étais sans cesse fourré au Parc du Tremblay ou à Champigny et j’ai appris à jouer tout seul. »

Passionné de biomécanique, de l’étude du corps et de ses mouvements, le jeune homme progresse vite. En cinq ans, il est 4 d’index et décide de passer son diplôme de moniteur de golf. « J’ai abandonné l’éducation nationale, car j’avais le sentiment de faire de la garderie ou du flicage plutôt que de l’enseignement. J’ai préféré me consacrer à 100 % au golf. En revanche, c’était une erreur d’apprendre seul, j’aurais dû prendre des cours. Il est toujours plus difficile de déconstruire que de construire et certains défauts ne peuvent pas être corrigés. »

Il n’empêche, un an plus tard le voilà diplômé et enseignant à temps partiel au golf de Clément Ader en Seine-et-Marne. Pendant un an, le jeune pro dispense cours d’EPS en semaine et leçons de golf le week-end avant d’obtenir un poste à temps plein au golf de Cély-en-Bière. Il y reste plus de deux ans jusqu’à la reprise du golf par la société NGF. « Nous étions deux enseignants et ils n’en voulaient qu’un à des conditions difficilement acceptables. Nous sommes donc tous les deux partis. » Le voilà de retour à Clément Ader, seul et avec une carte blanche pour l’enseignement.


COACH PERSO, UN LIVRE D’ENSEIGNEMENT LUDIQUE



À cette époque, Vincent Bucciarelli se lance dans la rédaction d’un livre. « Ma sœur est graphiste et créait alors une série de livres d’enseignement dans différentes disciplines sportives. Elle m’a demandé de m’occuper du golf. » Son ouvrage, Coach Perso, sorti en février 2011, est un carnet compilant les séances d’entraînement. Il propose ainsi quelques conseils techniques, mais surtout des dizaines d’exercices touchant à tous les compartiments du jeu. « Le but était d’apporter un aspect ludique à l’entraînement, d’essayer de s’éloigner des séries de balles sur le tapis pour mettre en place différentes situations avec un objectif à atteindre. » Concrètement, pour prendre l’exemple des approches roulées, l’élève aura différents exercices à effectuer afin de déterminer où faire tomber sa balle. En fin d’entraînement, il réalisera ensuite 10 coups pour tenter de réaliser une performance : « Pour chaque balle, il va mettre des points selon leur proximité avec le trou. Cela permet de mesurer le travail restant à accomplir tout en se rapprochant du jeu avec ce petit enjeu final. »


UNE FORMATION ENRICHIE



Au-delà de ce livre, Vincent Bucciarelli tourne également des leçons de golf en vidéo et rédige ses premiers articles pour le magazine Practice. Ses méthodes d’enseignement et son profil jeune et dynamique tapent finalement dans l’œil du golf voisin d’Ozoir-la-Ferrière où il pose ses valises en 2013. Doté d’une vraie soif de savoir, il cumule également les formations pour parfaire son enseignement. « Je suis un fou du jeu, j’adore ça. Je suis à la recherche, pour moi-même, comme pour les élèves, des secrets de la performance pour mieux jouer, mieux taper la balle et scorer. Je veux continuer à me former sans arrêt pour continuer à progresser. » Flightscope, TPI, vidéo, tout est bon pour avancer dans la compréhension du swing. Il y a quelques années, il assistait ainsi à une formation sur la biomécanique du swing, organisée par la PGA France en compagnie de Mike Adams, fraîchement élu « Best Teacher of the year » aux États-Unis.

« Je ne veux pas représenter une méthode d’apprentissage particulière. J’essaie de coller à chaque personne, aux différentes façons de jouer. Et pour cela, il y a du bon à prendre dans chaque démarche. Mike Adams a par exemple des idées arrêtées sur certains points, même s’il respecte chaque profil : appui jambe gauche, centré ou jambe droite. C’est génial, car cela permet de comprendre d’où viennent les sources de puissance. Mais je ne veux pas rentrer dans un schéma et essayer d’appliquer une formule magique à chaque golfeur. »


LE GOÛT DU TRAVAIL



Si, contrairement à bon nombre de ses confrères, Vincent Bucciarelli n’a jamais connu le haut niveau dans le golf amateur, il l’a en revanche touché de près dans une autre discipline : le VTT. Champion de France universitaire de descente, puis professionnel à une époque où la France dominait la discipline, le Vététiste dispute plusieurs épreuves de coupe du monde avant de se tourner vers le freeride, où il fut le premier à passer un back flip (salto arrière). « Ce sport est un atout majeur dans mon cursus. L’engagement physique et les prises de risques qui existent en VTT me font relativiser la façon dont j’aborde l’engagement sur un parcours de golf. On ne joue pas sa vie sur un coup de golf contrairement à certains sauts en VTT. » Il lui a surtout donné un goût du travail trop rare dans le golf. « Je me suis entraîné durement pour atteindre ce niveau en VTT. Malheureusement, dans le golf, les jeunes qui arrivent au haut niveau sont souvent issus d’un milieu aisé et n’ont pas toujours cette culture de l’entraînement, du dépassement de soi. J’essaie d’inculquer cela à mes joueurs : le goût du travail et du dépassement. »


L’ENVIE DE COACHER AU PLUS HAUT NIVEAU



Coach des équipes 1 femme (1e division) et homme (2e division), qu’il rêverait de faire monter en Gounouilhou, Vincent Bucciarelli jette également un regard goulu sur le haut niveau. Coach de Robin Roussel, il l’a mené à la finale des cartes du Tour européen l’an passé, après une victoire aux PQ1 et une troisième place aux PQ2. Le jeune joueur est ensuite passé entre les mains de la Fédération française de golf et du pôle France.

« Renaud Gris a voulu changer son swing. Avant, Robin montait à l’intérieur avec la face fermée, et il a voulu le faire monter en ligne avec la face square. Effectivement, maintenant il a un swing parfait, mais il a perdu ses réglages et la confiance avec, et il a manqué sa saison sur le Challenge Tour. Renaud est un bon technicien, mais de mon point de vue c’était une erreur de casser ainsi le swing d’un joueur en pleine bourre qui venait de battre les records des parcours aux PQ1 et aux PQ2. Quand on fait du coaching au haut niveau, il faut accompagner le joueur, encourager sa confiance et ne pas toucher à un swing qui marche bien. » Après cette saison manquée, Robin Roussel est de retour auprès de son ancien coach, tout en continuant sa collaboration avec Renaud Gris en parallèle.

Ce travail auprès de Robin Roussel a fait naître chez Vincent Bucciarelli l’envie d’entraîner au plus haut niveau. « Mais la concurrence est rude. Il y a deux ou trois grands gourous avec lesquels les jeunes veulent travailler. C’est compliqué de se faire un nom, mais j’aimerais me spécialiser dans le wedging. » Une formation avec Henrik Lundqvist, coach des coaches de Dustin et Zach Johnson dans ce domaine, lui a d’ailleurs permis d’en apprendre plus à ce sujet. « Au wedging, tout est une question de contrôle de la profondeur. Pour cela, il faut jouer bas et en draw, contrairement aux idées reçues. Avec Robin, nous avions réussi à mettre cela en place et c’était monstrueux. À Lumine, aux PQ2, il a joué -8 sur les neuf premiers trous en plantant six fois le drapeau. Il avait un contrôle de balle exceptionnel entre 60 et 110 mètres. J’aimerais beaucoup coacher d’autres joueurs de haut niveau dans ce domaine. »


Practice n°20 (2016) - Texte de Pierre Foare - Photos Philippe Millereau